Les voltigeuses de velours sont de retour !

Lors des soirées douces de mars, vous pouvez déjà les apercevoir ! Muni de votre infusion favorite, installez-vous à la fenêtre et contemplez le lampadaire public le plus proche. Après le coucher du soleil, si les conditions sont favorables, le joli spectacle des voltigeuses de velours vous donnera l’occasion de belles observations et réflexions.

Voici deux questions à méditer lors de vos observations avant de lire le reste de cette page : 

  • Voyez-vous des différences de comportement (vol, heure de sortie) ? 
  • Voyez-vous des différences d’aspect physique ? Si oui, à quoi pourraient être dues ces différences ?

Les deux espèces les plus visibles à la lumière artificielle sont les plus anthropophiles : la pipistrelle commune (Pipistrellus pipistrellus) et la sérotine commune (Eptesicus serotinus). La première est notre plus petite chauve-souris avec une envergure d’environ 20 centimètres, soit une main ouverte ; la seconde est nettement deux fois plus large.

Pourquoi ces différences de taille et de silhouette ?

Depuis l’Eocène, les chiroptères ont évolué morphologiquement en fonction de leur régime alimentaire et par conséquent, en fonction des caractéristiques physiques de leur territoire de chasse.

Quand elles ne profitent pas de la manne des lampadaires, les chauves-souris sont, toutes espèces confondues, étroitement liées à la forêt et leurs particularités morphologiques correspondent à une technique de vol adaptée à chaque strate végétale (d’où l’intérêt des forêts à forte naturalité, avec arbres sénescents et stratifications multiples).

La pipistrelle papillonne, avec des changements de direction réguliers, autour de la végétation. Elle alterne de larges cercles à quelques mètres de la végétation et des arabesques épousant les contours du feuillage. La sérotine vole de façon plus rectiligne à hauteur des feuillages.

À cette période où les nuits sont encore fraîches, trouvent-elles des insectes ?

Les chauves-souris quittent leur gîte d’hiver et chassent lors des soirées douces. C’est une période critique, car malgré le ralentissement de leur métabolisme durant l’hibernation, les chauves-souris brûlent plus d’un tiers de leur masse corporelle.

Dès lors, soit elles puisent dans leurs dernières réserves de graisse, soit il leur faut trouver des proies sans trop de dépenses énergétiques. Pour les femelles en particulier, il est important de se préparer à la gestation et à l’élevage de leur unique petit qui naîtra en juin. Heureusement pour elles, quelques insectes hivernent à l’état adulte dans les gîtes d’hiver et d’autres sont actifs dès les premières températures favorables.

Pourquoi les papillons nocturnes sont-ils attirés par la lumière ?

Ils sont davantage perturbés que véritablement attirés. Pour qui vole dans la nuit sans éclairage artificiel, la lune ou une étoile est un point de repère avec lequel l’insecte maintient un angle constant à son axe de vol. Mais avec une lumière proche, l’insecte suit une spirale sans jamais atteindre son but, à moins de se brûler à la lampe.

Pourquoi l’éclairage est-il considéré comme néfaste pour les chauves-souris ? 

À plus ou moins long terme, les proies se raréfient. Car pendant qu’ils tournent autour de la lumière, les insectes ne se reproduisent pas ! Les chauves-souris sont nyctalopes et lucifuges. Bien que certaines langues renforcent la vieille croyance en leur cécité (murciélago, morcego : souris aveugle), les chauves-souris partagent avec la plupart des mammifères sauvages la vision dichromatique, plus sensible aux mouvements et aux contrastes.

Elles sont donc bien plus à l’aise dans l’obscurité qu’en pleine lumière du jour. Lorsque les sorties de gîtes sont éclairées, les colonies fuient.

Comment agir de façon éclairée en faveur des chauves-souris ?

Lorsque vous éclairez votre intérieur, pensez à occulter les fenêtres. Passez-vous d’éclairages extérieurs ou concevez-les avec le faisceau dirigé vers le bas. Lors de vos noctambulations, recourez à une lampe ambrée ou recouvrez votre lampe d’un chiffon rouge… mieux encore, passez-vous de lampe !

Suggérez aux pouvoirs communaux d’installer un éclairage LED ambré (comme par exemple à Auderghem -Bruxelles, rue du Rouge-Cloître, qui mène les promeneurs depuis la chaussée de Tervueren jusqu’au mur d’enceinte) : cette teinte permet à un promeneur d’identifier un passant arrivant en sens inverse, évitant ainsi un effet anxiogène, sans gêner les chauves-souris et la faune sauvage en général.

Rédigé par Isabelle Pierdomenico, écopédagogue spécialisée en chiroptères et autres mammifères indigènes.


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