Agriculture et Climat

Comment pouvons-nous aider ce dernier à l’aide de la première ?

Les changements climatiques actuels sont provoqués par un réchauffement terrestre global. La cause humaine de celui-ci a été démontrée par de nombreuses études ces dernières années. Les émissions de gaz à effet de serre sont une des causes premières mais pas la seule.

La façon dont nous exploitons les terres est également une cause impactant et amplifiant le changement que connaît notre climat.

La déforestation est évidemment une des causes qui vient immédiatement à l’esprit. Celle-ci est bien souvent la conséquence d’une agriculture qui se veut de plus en plus intensive, afin de produire divers produits et sous-produits agricoles tels que l’alimentation du bétail, les biocarburants mais aussi les fibres textiles telles que le coton.

L’impact des changements climatiques sur l’agriculture

D’ici 2050, la FAO estime que la demande en nourriture devrait augmenter de 60 %. La demande croissante est due à de multiples facteurs tels que la croissance démographique mais également l’évolution des besoins des populations.

Outre l’alimentation, l’agriculture nous fournit également d’autres ressources, textiles mais aussi énergétiques via les biocarburants. Ces demandes, elles aussi, ne cessent d’augmenter dans des proportions comparables aux besoins alimentaires.

Or, les changements climatiques risquent de compromettre non seulement la productivité des ressources agricoles mais également leur qualité.

Parmi les problèmes auxquels nous serons confrontés demain, nous pouvons citer les suivants :

  • Les cultures risquent de voir leur croissance fortement modifiée par une modification sensible des périodes de végétation causée par des variations de températures plus imprévisibles.
  • L’augmentation du dioxyde de carbone atmosphérique va également avoir des impacts directs sur la croissance des végétaux en augmentant le rendement de la photosynthèse mais également en augmentant l’évapotranspiration des plantes, augmentant ainsi les besoins en eaux et en minéraux des cultures, les rendant également plus sensibles aux pathogènes.
  • L’émergence de nouvelles espèces de ravageurs constituera également un défi pour les agriculteurs qui se trouveront confrontés à de nouvelles espèces phytophages et/ou pathogènes. De plus, les espèces déjà présentes vont probablement modifier leurs cycles biologiques afin de s’adapter aux nouveaux facteurs climatiques tandis que d’autres vont disparaître. L’ensemble des biocénoses actuellement présentes dans ces milieux se modifiera, pouvant induire de nouvelles pullulations inconnues jusqu’alors.
  • Les cycles végétatifs, les phénomènes de dormance, la vernalisation, etc. vont également se décaler dans le temps avec le changement de la thermopériode, impactant directement la production des fruits et des graines, compromettant également parfois la survie d’espèces et de variétés pourtant productives jusqu’à présent.
  • La fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes tels que tempêtes, orages, pluies torrentielles ou au contraire sécheresses, risque également de s’accentuer. Ils auront des conséquences désastreuses et bien souvent imprévisibles sur les cultures. L’ensemble de ces modifications sera bien évidemment inéquitable et certaines régions de la planète seront vraisemblablement plus touchées que d’autres. Néanmoins, il existe des pistes de solutions. Il n’y a pas de solution miracle, il faut au contraire exploiter de nombreuses voies et additionner les techniques afin de parvenir à un début de solution tout en visant à réduire tant les causes que les conséquences des changements climatiques.

Le choix des espèces et des variétés

Évidemment, ne pas vouloir faire des cultures monospécifiques est une chose, mais même en polyculture, il est important de prendre en compte l’ensemble des facteurs édaphiques de son milieu. Aussi, plutôt que de vouloir absolument modifier l’environnement, pourquoi ne pas plutôt chercher à adapter ses cultures à la station. La sélection de variétés anciennes mais aussi nouvelles est une piste intéressante. Si l’on désire se prémunir des dommages du climat, le choix de variétés plus rustiques, plus résistantes et adaptées est primordial.

Si ces variétés n’existent pas, le processus de sélection naturelle peut permettre de répondre à ces besoins nouveaux et ce tout en respectant la diversité génétique des espèces car chaque milieu peut avoir sa ou ses variétés mieux adaptées.

Le stockage du carbone

Afin de prévenir une augmentation continue du taux de carbone atmosphérique, il est important de mettre en place des systèmes afin de pouvoir stocker cet élément hors de l’atmosphère. Les végétaux, de par la photosynthèse, consomment une partie du dioxyde de carbone pour le convertir en sucres. Encore faut-il par la suite que celui-ci soit stocké durablement.

La plantation d’arbres, arbustes et autres végétaux ligneux sont des pistes intéressantes. Une polyculture en « forêt jardinée » associant sylviculture et polyculture alimentaire sont là aussi des pistes non négligeables à prendre en compte.

La préservation de l’eau et des sols

Enfin, les modifications du climat vont fortement modifier la disponibilité de l’eau dans les sols mais également influencer très négativement sur la préservation de ceux-ci. La couverture végétale permanente, un des piliers de l’agriculture permacole, est évidemment à prendre en considération. Cette protection limitera les phénomènes de ruissellement, la création d’une croûte de battance mais également l’érosion des sols à la suite de pluies abondantes et ponctuelles.

Le couvert peut aussi simplement être organique par le biais de bois raméal fragmenté (BRF) qui est un mélange non composté de résidus de broyage (fragmentation) de rameaux de bois (branches), issu majoritairement d’arbres feuillus. Celui-ci, peu coûteux à produire, servira également à contribuer au stockage du carbone atmosphérique.

Afin de produire ces matières ligneuses, des haies mixtes indigènes peuvent être implantées. Elles constituent des protections naturelles vis-à-vis des vents, du soleil, augmentant même la rentabilité des parcelles dans le voisinage de la haie, mais limitent également les phénomènes de ruissellement, ces derniers contribuant à l’appauvrissement des sols.

Ces haies ont de multiples rôles dans la préservation de nos terres cultivées. Outre les effets protecteurs au niveau climatique mentionnés précédemment, il est utile de noter leur intérêt au niveau de la faune indigène. Cette faune va constituer un réservoir à organismes auxiliaires contribuant ainsi à diminuer l’usage de pesticides, ayant un impact conséquent sur la biocénose mais également sur la santé humaine tant pour le producteur que pour le consommateur. Il est important afin d’amplifier ce rôle que la haie soit mixte et non monospécifique, constituée majoritairement d’essences indigènes et surtout que celle-ci soit libre, c’est à dire peu voire pas taillée, et étagée, c’est à dire constituée de végétaux de diverses hauteurs.

Il est évidemment important pour cet aménagement, comme pour les cultures, de bien réfléchir à adapter l’essence à la station, minimisant ainsi les entretiens et renforçant l’intérêt écologique de cet aménagement.

Conclusion

Toutes ces méthodes mentionnées sont évidemment des pistes qui doivent être explorées et approfondies. Le particulier lui-même peut appliquer à son échelle ces différentes méthodes. Il importe aussi que celui-ci, en tant que consommateur, fasse des choix raisonnés et tente de favoriser une agriculture de proximité et de qualité plutôt que de promouvoir une industrialisation à outrance qui a sa part de responsabilité dans la problématique qui se présente à nous. Il est du devoir de chacun en tant que naturaliste de veiller à communiquer et montrer l’exemple afin que nos systèmes agricoles évoluent dans le bon sens.

Rédigé par Yves Desmons, écopédagogue pour notre formation au jardinage naturaliste.