La première originalité de ce projet est donc la rencontre entre ces deux communautés ayant des approches différentes. Cette expérience est la première à l’échelle de la Wallonie, et elle a pour but d’utiliser ces différences comme des atouts, grâce à leurs complémentarités. Effectivement, la sphère des naturalistes en milieu associatif regroupe des bénévoles passionnés du vivant (biophiles), qui ont des connaissances très pointues de leur environnement et de leurs habitants. L’identification des espèces, leur écologie et leur comportement n’ont pas de secret. L’objectif principal de la communauté naturaliste est de partager la connaissance avec les citoyens, mais aussi de les sensibiliser à cette nature dont nous faisons partie et ainsi transmettre cette passion.
De l’autre côté, le monde scientifique est lui aussi composé de personnes animées par la passion du vivant, mais dans une démarche structurellement différente. En effet, d’après Guillaume Lecointre, les scientifiques ont pour objectif de « […] produire collectivement des explications rationnelles du monde réel » grâce à des outils, notamment informatiques, qui ne sont pas toujours accessibles. En résumé, l’objectif de la communauté scientifique est de rendre compte de faits de façon rationnelle et quantifiable, destinés à être utilisés comme outils d’aide à la décision, notamment politique.
On voit donc bien la portée que pourrait avoir un projet alliant les deux communautés. Grâce aux connaissances des naturalistes et la boite à outils des scientifiques, de nombreuses portes s’ouvrent à nous ! Les journées de “workshop” en sont les parfaits exemples.
La deuxième originalité du projet est de s’intéresser à des sites généralement vus comme des espaces inutiles et à détruire, dans le but d’être valorisés. En effet, l’objet de ce projet, les friches industrielles, ne sont généralement pas mises en avant pour la conservation de la biodiversité. Pourtant, ces sites sont relativement peu documentés et nos connaissances à leur sujet sont très minces, notamment pour deux raisons :
- ce ne sont généralement pas des sites « attirants » pour l’humain (scientifiques et naturalistes) ;
- la « biodiversité » est vue à travers un filtre, qui conditionne les groupes taxonomiques les plus « intéressants », c’est-à-dire les animaux vertébrés, les plantes, les insectes visuellement « beaux » (papillons, libellules, coléoptères…), qui sont majoritairement absents de ces sites.
Ce dernier point constitue la troisième originalité de ce projet : le choix des groupes taxonomiques. Effectivement, il est reconnu que certains « taxons » sont plus documentés que d’autres, bien que cela ne soit aucunement lié à leur abondance ou leur importance écologique. Pourtant, ils ne correspondent qu’à la partie émergée de l’iceberg. On parle alors de biais taxonomique. Le mot « biodiversité » se traduit d’ailleurs par « la diversité du monde vivant », et non pas par « la diversité d’un nombre restreint d’espèces ». Afin de pallier ce biais taxonomique, nous avons décidé, dans le cadre du projet, de prioriser les taxons peu connus, tout en prenant en compte ceux plus documentés susceptibles d’être présents dans des habitats ayant été modelés par les actions anthropiques. Nous avons donc sélectionné les taxons suivants : Reptiles, Lichens, Orthoptères, Hétéroptères (punaises) et Aranéidés. Le nombre d’espèce étant en majorité très grand, un certain nombre de ces taxons ont été restreint à quelques familles. Mais tout cela vous sera expliqué plus amplement par les écopédagogues des CNB.
En parallèle, des étudiants de master en biologie à ULiège réalisent leur travail de fin d’étude dans le cadre du projet, sur deux autres aspects : la flore et la faune vertébré terrestre.