C’est officiel, après 38 ans passés aux CNB, notre écopédagogue spécialiste écologie, botanique et géomorphologie de la formation Guide-Nature® prend sa retraite, mais il n’a pas l’intention de s’arrêter pour autant ! Retour sur la vie d’un passionné et passionnant naturaliste, ainsi que son parcours au sein des CNB.
Yves Camby
Comment es-tu devenu passionné par la nature ?
Grâce à de formidables plaines de jeux qu’étaient les fermes de mes grands-parents et de mes oncles en Hesbaye : poules, cochons, vaches, chevaux de trait (les plus beaux, les vrais) et bien entendu des machines extraordinaires faites de métal, de bois, de graisses et d’huiles chaudes, d’odeurs de caoutchouc et de terre, des champs de céréales plus hautes que moi et mes cousins, des betteraves, du lin… Et des kilomètres de haies (années 60). Comme mes parents étaient instituteurs dans le Pays noir et qu’on habitait près des corons, on filait tous les vendredis soir chez mes grands-parents et on ne revenait que le dimanche soir. J’y ai passé toutes mes vacances pendant 18 ans, un paradis à temps partiel !
Quels ont été tes rôles aux Cercles des Naturalistes de Belgique ?
Dès le début, c.-à-d. en 1985, j’ai été détaché à Huy pour y jouer le rôle de personne-ressource en nature et environnement, les éco-conseillers n’existaient pas encore à l’époque. J’ai donc travaillé principalement en convention avec la Ville de Huy, mais aussi plus sporadiquement sur Modave, Marchin, Ohey. Une part essentielle consistait à guider des écoles en classes vertes d’une demi-journée ou d’une journée en forêt principalement.
Yves Camby avec une classe verte, en 1991 @Francine-Michel.
Je préside toujours le Cercle « La Mercuriale » de Huy. Au nom des CNB, nous avons relancé une école d’apiculture là-bas, Rucher École. Nous sommes présents dans le Contrat-rivière du Hoyoux (Meuse aval), dans le PCDN de Huy, et quelques autres structures encore.
Depuis de nombreuses années, j’ai aussi succédé à Léon au Conseil Supérieur de la Conservation de la Nature, aujourd’hui appelé Pôle Ruralité (section nature). Ce qui fait que je préside alors 2 Commissions Consultatives de Gestion des Réserves Naturelles Domaniales (Directions de Dinant et de Namur au DNF).
Et dans la formation Guide-Nature ?
Oui, la formation Guide-Nature est apparue assez vite dans mon parcours et j’ai pris la responsabilité de quelques modules en tant qu’écopédagogue, partagés fort heureusement avec mes collègues :
- Écologie générale (héritée de Léon), avec Michaël.
- Botanique et les séances de travaux pratiques, avec Bernard.
- Géographie humaine, avec Quentin.
- Géomorphologie, avec Jean-François et Muriel.
Je les ai délivrés à Vierves, Bruxelles, Bonsecours, Grapfontaine, Namur et certains d’entre eux à Liège chez nos confrères et partenaires d’Éducation-Environnement. Mais aussi pour l’écologie générale au CERES de Liège et pour la géologie-géomorphologie au Club Alpin Belge de Namur. De 2011 à 2023, j’étais le coordinateur des formations Guides-Nature en journée et du soir à Namur & Floriffoux.
Que vas-tu faire maintenant ? De tout ce temps…
1) un mois de vacances 2) mon jardin et mon verger 3) rafraîchir la maison qui en a bien besoin 4) user une nouvelle paire de godasses (acquise via un super bon d’achat en cadeau, grand merci à vous tous) en Pyrénées et aller jusqu’à trouer leurs semelles en Norvège ou les faire fondre sur les volcans d’Islande. 5) parcourir plus finement la Wallonie et y préparer des sorties géomorphologiques pour la section et les CNB 6) si mon genou et mes oreilles internes le permettent, retourner sous Terre avec les copains spéléos 7) râler beaucoup (et encore râler) sur l’évolution du monde et même préparer une lettre de doléances pas piquée des vers à l’attention d’un grand Architecte de l’Univers au cas où… et puis nous verrons …
Quel souvenir vas-tu garder des CNB ?
J’ai eu une vie professionnelle de rêve !!! Exigeante à plus d’un titre, mais à refaire je signe des 4 mains ! Un écosite formidable, un centre inoubliable, l’obtention de clefs de lecture des paysages et de la vie… Puisque j’ai aussi obtenu mon brevet de Guide-Nature. Et surtout des moments d’échanges toujours riches avec les collègues, mais aussi avec Léon et Robert Fourneau (entre autres) qui m’ont à la fois mis en confiance et qui ont parié sur mon parcours CNB.
Je me souviens aussi de ma rencontre avec Léon. C’était en 83 ou 84, avec le Groupe Spéléologique de Charleroi, nous étions partis nous entraîner au maniement des cordes et techniques de progression sur le site du Fondry des chiens. Mon R4 était garée au plus près, donc bien entendu en infraction sur la pelouse entre le bois et le Fondry. Il y avait même des bières dans le coffre, c’est vous dire ! Alors que nous étions sur les rochers, une silhouette se détache presque timidement sur le bord du gouffre et attend patiemment que nous remontions. Une fois en haut, salutations polies et présentations : Léon Woué, Conservateur de la RN du Fondry des chiens. Imaginez alors une conversation respectueuse, faite d’échanges : pourquoi une RN ? Pourquoi grimper en rochers ? Pourquoi un Parc Naturel dans la vallée du Viroin ? Dommage que les « vraies » montagnes soient si loin, etc.
Bref, après avoir véritablement reçu une leçon de nature, de la part d’un amateur de montagnes lui aussi, nous voici bien dépités et désolés, mais nous promettons de respecter bien davantage (en n’y venant plus pour ça) un site dont n’avions pas pris la peine de nous tracasser. Fantastique leçon de communication de la part de Léon qui ne s’était fâché à aucun moment.
Puis un jour, sur l’insistance de ma mère et sur le conseil de Robert Fourneau (vous savez ce géomorphologue faisait aussi partie du Groupe Spéléologique de Charleroi… !) me voici à frapper à la porte du centre à Vierves, sans rendez-vous et sans guère d’illusions sur l’obtention d’un emploi. Surprise ! Lui le « petit bonhomme du Fondry » qui ouvre et moi, gêné bien entendu, car pour moi, le souvenir est un flash instantané, C’est foutu ! Eh bien non, après quelques échanges, le hasard a fait que Léon et les CNB étaient dans une phase de mise en place d’une forme de diversification des activités du centre et, comme les structures administratives et sociales étaient porteuses, le projet a eu vite fait de se mettre en place. Quelques mois plus tard, je rejoignais les membres du personnel avec une mission plutôt diversifiée dans ses tâches en région hutoise.
Je pense que Léon avait oublié cette rencontre au Fondry. Ce qui aurait au départ pu être un conflit, n’a été qu’échanges polis et fructifiant pour les uns et les autres. Quelle leçon.
Remerciements
Énorme merci à tous les collègues, sans exception et quelle que soit leur fonction ou ancienneté dans la maison ! Merci Bernard pour ton écolage précieux, merci Robert Fourneau, véritable puit de science et de terrain, merci Catherine Timmermans qui a su prendre sa part d’animations et qui nous a grandement soulagés dans l’organisation et sur le fond de la matière. Et bien entendu respect maximal à Léon et tous les pionniers (y compris les Canadiens qu’il a côtoyé et qui l’ont inspiré) et aux membres du CA qui l’ont entouré. Tout ce qu’il a bâti est extraordinaire !
J’ai l’impression de refermer (avec tristesse, parce que c’est fini) un livre fantastique, mais je vais pouvoir retourner lire à nouveau les chapitres qui m’ont bien plu et il trônera à la place d’honneur sur ma bibliothèque, je ne l’oublierai pas !
Bienvenue et bon parcours à tous les nouveaux collègues, et que les anciens s’accrochent, car la relève est là et ils en veulent ! Allez, à un de ces quatre.
Nous souhaitons bon vent à Yves, merci à toi pour toutes ces années passées à faire évoluer et vivre les CNB, et celles passées à nourrir nos Guides-Nature avec tes connaissances naturalistes. Merci pour ta gentillesse sans égale, ton sens de l’écoute et du compromis mais aussi pour ton dévouement ! À bientôt du côté de Huy !